==> Retrouvez la VIDÉO de la formation en bas de l’article
Source : « Comparison of avalanche survival patterns in Canada and Switzerland », Haegeli P, Falk M., Brugger H., et al.
Pas besoin de long discours pour justifier le fait que les randonneurs et skieurs hors pistes doivent être équipés du matériel de sécurité, la courbe de survie de Brugger et Falk (Cf. graphique suivant) me semble suffisamment explicite… Jusqu’à 18 min d’ensevelissement, une victime a 91% de chances de survie si elle est dégagée à temps. Au delà, ses chances chutent considérablement, tout se joue donc dans les premières minutes !
Même si les secours sont parfaitement compétents en matière de recherches et de sauvetage, ils est souvent trop tard lorsqu’ils arrivent sur place. Il est donc important que chacun soit formé pour adopter les bons réflexes et agir efficacement dans un laps de temps très court.
L’ANENA (association pour l’étude de la neige et des avalanches) organise tout au long de l’hiver des formations en partenariat avec des guides et accompagnateurs. Destinées à tous les pratiquants de la montagne en hiver quelque soit leur niveau de connaissance, ces formations permettent aussi de se familiariser avec son matériel et de s’entraîner en « conditions réelles ». La formation Sauvetage avalanche se compose en 2 sessions d’une demie journée chacune :
Le rendez-vous est donné à Argelès Gazost à 8h30. Patrice FAURET, formateur et guide de Haute Montagne a choisi d’emmener le groupe passer la matinée sur les hauteurs de Hautacam, petite station familiale des Hautes Pyrénées.
La journée commence par une partie théorique autour d’un bon café et d’un feu de cheminée. Patrice passe en revue les grandes étapes d’un sauvetage en avalanche : contrôles de départ, déclenchement des secours, conduite à tenir lors du sauvetage, message d’alerte, rôle du leader, phases de recherche et prise en charge des victimes.
Pendant une bonne heure, les participants sont à l’écoute et des discussions s’installent sur des cas précis : à quel moment passer l’alerte en cas d’accident en petit groupe (1à3 personnes), faut-il garder les skis pendant la phase de recherche, que faire en cas de multi ensevelissement etc. Les échanges sont riches entre les participants et l’expérience de Patrice en tant que guide de Haute Montagne depuis de nombreuses années nous éclaire sur tous ces sujets complexes. Nous comprenons tous qu’entre la théorie et la pratique, il y a un monde !
Après la théorie, place à la pratique même si les conditions météo ne sont pas vraiment de notre côté mais tant pis, l’important c’est de s’entrainer. Pendant 2 heures, les exercices s’enchaînent : contrôles de départ, recherche multi victimes, rôle du leader, organisation du sauvetage, techniques de sondage, de pelletage… A chaque fois, les exercices sont chronométrés et nous changeons les rôles pour que chacun puisse s’exercer en tant que leader.
A la fin de chaque exercice, Patrice nous apporte son expertise sur l’exécution et les gestes et nous échangeons entre nous sur les difficultés rencontrées et les points d’amélioration. Ces debriefings sont extrêmement enrichissants car nous nous rendons compte que nous faisons tous des erreurs qui font perdre un temps précieux mais c’est aussi le but de ces exercices : commettre des erreurs et les analyser pour ne pas les reproduire.
Après 2 heures de pratique, nous retournons en salle pour faire le bilan et de l’avis de tous, cette demie journée a été particulièrement enrichissante tant sur le plan théorique que pratique. Les exercices ont fait ressortir des points essentiels sur lesquels la théorie est souvent en décalage avec la pratique :
Bref, ce fut un bon moyen de se rendre compte que la pratique est toujours plus compliquée que la théorie ! Seul un entraînement régulier en « situation réelle » permettent de gagner de précieuses minutes le jour où l’accident arrive et éviter que la panique prenne le dessus.
Une demie journée passée dans la bonne humeur autour de Patrice Fauret, guide de Haute Montagne
Avant de rentrer dans le détail, revenons rapidement sur les facteurs physiques de déclenchement d’une avalanche provoquée. Pour qu’une avalanche de neige se produise il faut que 3 à 4 de ces facteurs soient réunis :
Les nombreuses études sur les avalanches montrent que la grande majorité des coulées a lieu dans des pentes de plus de 30° d’inclinaison. Le graphique suivant montre que la plupart des accidents étudiés ont lieu dans des pentes comprises entre 30° et 45°. Ce chiffre n’est pas surprenant dans la mesure ou moins la pente est raide et moins elle est susceptible de se décrocher et qu’à partir de 45° ou 50°, les pentes se purgent naturellement et sont très peu skiées il y a donc moins d’accidents. Même si le 30° doit être gravé dans toutes les têtes, certains accidents peuvent se produire dans des pentes légèrement inférieures, la vigilance est donc de mise en fonction des conditions.
Source : Mountain Acadamy
L’orientation des pentes est un facteur important dans le déclenchement des avalanches. Si les pentes ensoleillées sont celles qui se stabilisent le plus rapidement sous l’effet du rayonnement solaire, celles à l’ombre des versants Nord
ou d’un plus large secteur N-E à N-O sont propices à l’enfouissement de pièges à retardement tout au long de l’hiver. La faible variation des températures dans les zones encaissées va ralentir l’effet de cohésion entre les grains. Ainsi, une couche fragile peut rester enfouie et recouverte pendant des semaines la rendant particulièrement difficile à déceler. L’excès de soleil peut également provoquer des avalanches de neige humide qu’il est bien plus facile d’éviter en choisissant ses heures de randonnée notamment au printemps.
La carte des pentes du Géoportail permet de repérer aisément les zones à risques
En pleine ère du numérique, rien de mieux qu’une bonne vieille carte papier au 1/25000ème pour analyser avec précision l’inclinaison des pentes que l’on va rencontrer sur l’itinéraire envisagé. Afin de calculer l’inclinaison de la pente, il est possible d’utiliser une réglette ou de regarder directement sur la carte des pentes du Géoportail. A travers ce portail interactif, l’IGN (institut géographique national) met à disposition des données de grande qualité et notamment un affichage des cartes en 3D !
Attention néanmoins à ce dernier outil car évoluer en dehors des zones à risques ne signifie pas que vous êtes en sécurité, les coulées d’avalanches terminent leur course dans les pentes inférieures à 30°. Plus le risque est grand et plus il faut prendre de la distance avec les zones rouge et oranges.
Sur le terrain, il existe également des moyens de mesurer la pente. Premier point de vigilance, dîtes vous qu’à partir du moment où vous êtes obligé de faire des conversions pour monter, c’est que la pente fait environ 30°. Ensuite, il est possible de réaliser le test du pendule avec les bâtons (de longueur identique).
Pour info, sachez qu’un écart de 10 cm entre l’empreinte et la pointe représente 3° de pente.
Météo et avalanches: l’outil indispensable pour préparer sa sortie
*Etude de Ian McCammon(2009)